Impétigo: prise en charge

- Le premier pas dans la prise en charge de l’impétigo consiste en des mesures d’hygiène (e.a. nettoyer régulièrement les lésions et laver fréquemment les mains au savon et à l’eau).
- L’application d’antiseptiques n’est pas recommandée.
- L’antibiothérapie locale peut être envisagée en cas de lésions cutanées peu étendues, certainement lorsque le risque de transmission est élevé (particulièrement chez les jeunes enfants en collectivités), dans le but de limiter la dissémination des germes et la transmission de l’infection, et d’accélérer la cicatrisation des lésions. L’acide fusidique est l’antibiotique local de premier choix.
- L’antibiothérapie orale est recommandée en cas d’échec du traitement local, d’impétigo étendu, d’adénopathie ou de symptômes généraux (p.ex. fièvre) ; la flucloxacilline est alors le premier choix.
- En cas de de lésions étendues ou d’épidémie, il est recommandé d’évincer l’enfant de la collectivité.

L’impétigo (impetigo vulgaris) est une infection bactérienne superficielle de la peau qui touche généralement les enfants âgés de moins de 12 ans, surtout les jeunes enfants. Cette infection est bénigne mais très contagieuse (tant que les lésions ne sont pas sèches) et se transmet par contact direct ou indirect (objets, linge ou vêtements entrés en contact avec les lésions). Les bactéries en cause sont le plus souvent Staphylococcus aureus et parfois Streptococcus pyogenes. Chez l’individu en bonne santé, cette affection peut guérir spontanément après 2 à 3 semaines, mais le traitement permet d’accélérer la cicatrisation des lésions et de limiter la dissémination des germes et la transmission de l’infection. Les complications d’un impétigo (infections des couches profondes de la peau ou des tissus avoisinants) sont très rares.1,2,4,5

Impetigo vulgaris
  

Impetigo bullosa

- Les lésions de l’impétigo (parfois appelé impétigo croûteux) sont caractéristiques et se présentent sous forme de petites pustules ou vésicules qui se rompent rapidement pour laisser place à une croûte jaunâtre. Ces lésions touchent souvent le visage, notamment le pourtour de la bouche ou du nez, et les mains.1,2
- L’impétigo évolue rarement vers des infections graves des couches plus profondes de la peau ou des tissus, comme un ecthyma (pustules avec ulcération du derme), une lymphangite, un érysipèle, une épidermolyse staphylococcique, une hypodermite, une septicémie ou des infections osseuses ou articulaires. Le diabète et l’immunodépression sont des facteurs qui augmentent le risque de complications.1
- L’impétigo d’aspect bulleux est plus rare que l’impétigo croûteux1,2 et est caractérisé par des bulles suintantes qui laissent place à une croûte brunâtre après rupture.Elles sont localisées au niveau du tronc, l’extrémité des membres, au niveau axillaire ou des couches chez les bébés.1

Mesures hygiéniques

Les mesures d’hygiène permettent d’éliminer les germes pathogènes et de limiter la dissémination et la transmission de l’infection. Elles consistent à nettoyer plusieurs fois par jour les lésions et les mains à l’eau et au savon, éviter de gratter les lésions (p.ex. en les couvrant1), utiliser un linge unique pour sécher les lésions après lavage, laver quotidiennement le linge et les vêtements en contact avec les lésions jusqu’à ce que celles-ci soient asséchées, et couper les ongles court et les maintenir propres. L’hygiène des mains est également à encourager auprès de l’entourage de la personne infectée.1,4,6

Traitement local

  • L’application d’antiseptiques au niveau des lésions ne s’est pas avérée plus efficace que le nettoyage au savon et à l’eau, peut exposer à des effets secondaires (p.ex. irritations cutanées, dermatite de contact, voir Répertoire 15.1.1.) et n’est donc pas recommandée. Les études disponibles sont peu nombreuses et de faible qualité méthodologique.1,2,5,6
  • L’antibiothérapie locale peut être envisagée en cas de lésions peu étendues, certainement lorsque le risque de transmission est élevé (p.ex. chez les jeunes enfants en collectivités). Le but de l’antibiothérapie locale est de limiter la dissémination des germes et la transmission de l’infection, et d’accélérer la cicatrisation.1,2 L’acide fusidique est l’antibiotique local de premier choix (posologie: 3 fois par jour pendant maximum 14 jours). La mupirocine est à réserver au traitement d’infections à Staphylococcus aureus méticillino-résistants (MRSA).2,4,6,7
- Les antibiotiques locaux sont plus efficaces que le placebo pour traiter l’impétigo. L’acide fusidique est aussi efficace que la mupirocine.1,5,8
- La Revue Prescrire opte pour la mupirocine comme premier choix parce qu’en France, l’acide fusidique est également disponible en usage oral et parentéral, tandis que la mupirocine n’est disponible qu’en application cutanée. Or, étant donné que l’application cutanée d’antibiotiques augmente également le risque d’émergence de résistances bactériennes il paraît justifié, dans le cas de la France, d’opter pour la mupirocine afin de préserver l’efficacité de l’acide fusidique lorsqu’il est utilisé par voie orale ou parentérale.1
  • Il est à noter qu’il existe également un risque d’émergence de souches bactériennes résistantes (comme les souches MRSA) lors de l’application locale d’antibiotiques.1 Pour limiter ce risque, il est recommandé de ne pas utiliser l’acide fusidique plus de 14 jours.1,2,6,7 Les effets indésirables des antibiotiques locaux sont peu fréquents et consistent notamment en un érythème, une dermatite de contact, un prurit ou une sensation de brûlure.1

Antibiothérapie orale

L’antibiothérapie par voie systémique peut être envisagée en cas de lésions étendues (plus de 2% de la surface corporelle atteinte ou plus de 10 lésions actives), d’échec du traitement local, d’adénopathies ou de symptômes généraux tels que de la fièvre. 1,2,6,7 Cependant, plusieurs études montrent que les antibiotiques oraux ne sont pas plus efficaces que les antibiotiques par voie cutanée. De plus, ils exposent à plus d’effets indésirables. Les études comparant différentes antibiothérapies orales entre elles sont de faible qualité méthodologique.1,2 Néanmoins, la plupart des recommandations1,2,6,7, entre autres celles de la BAPCOC, positionnent la flucloxacilline comme antibiotique oral de premier choix (enfant: 25-50 mg/kg par jour en 3 à 4 prises pendant 7 jours; adulte: 1-2 g par jour en 3 à 4 prises pendant 7 jours7; à prendre 1 heure avant ou 2 heures après les repas, voir Répertoire 11.1.1.1.2.). En cas d’allergie IgE-médiée aux pénicillines, un néomacrolide (la clarithromycine, l’azithromycine ou la roxithromycine) est une bonne alternative.2,6,7 En cas d’interactions médicamenteuses ou de contre-indications pour les néomacrolides (p.ex. risque d’allongement de l’intervalle QT, voir Répertoire 11.1.2.2.), la clindamycine2,6 ou la spiramycine1 sont proposées.

Prise en charge d'un impétigo récidivant

En cas d'impétigo récidivant, il convient de

  • vérifier le respect des mesures d'hygiène et l'observance du traitement;
  • dépister le portage de Staphylococcus aureus. Le cas échéant, il est recommandé d’appliquer de la mupirocine au niveau nasal pendant une semaine et d’évaluer l’effet après 3 mois.2,6

Mesures supplémentaires

Chez les jeunes enfants en collectivité (crèches, écoles), le risque de transmission de l’impétigo est élevé mais les recommandations quant à l’éviction de la collectivité ne sont pas unanimes. Etant donné qu’une personne atteinte d’impétigo est déjà contagieuse avant l’apparition des lésions, il n’est pas possible d’éviter complètement la transmission de l’infection. Demander l’éviction de l’enfant atteint de la collectivité peut diminuer le risque de transmission de l’infection mais ne peut pas l’exclure. Les mesures d’hygiène sont essentielles pour limiter au maximum la transmission. En cas d’épidémie ou lorsque les lésions sont étendues, il est certainement recommandé d’évincer l’enfant de la collectivité et d’autoriser son retour seulement 48 heures après l’instauration d’un traitement antibiotique ou lorsque les lésions sont complètement asséchées.1,2,3,6

- Certaines sources néerlandaises2,6 estiment que, puisque l’enfant est déjà contagieux avant l’apparition des lésions, l’éviction n’est pas nécessaire, sauf en cas d’épidémie ou lorsque les lésions sont étendues. Dans ces deux cas, l’enfant évincé peut réintégrer la collectivité une fois les lésions asséchées ou un traitement instauré.
- La Revue Prescrire recommande, lorsque les lésions ne peuvent pas être recouvertes de par leur localisation ou étendue, une éviction de 72 heures à partir du début du traitement (oral ou local).1
- Selon l’Agence pour une Vie de Qualité (AViQ), soutenue par Sciensano, l’enfant peut fréquenter la collectivité à condition d’être traité et que les lésions soient sèches. Sinon, l’enfant sera évincé jusqu’à guérison complète.3

Sources spécifiques

1 Impétigo. Mesures d’hygiène et souvent mupirocine associée. La Revue Prescrire 2018, 38:115-20.
2 Bons SCS, Bouma M, Draijer LW et al. NHG-Standaard bacteriële huidinfecties. NHG, 2017.
3 Impétigo. Fiche informative AViQ, 2016, via https://www.wiv-isp.be/matra/Fiches/Impetigo.pdf

4 Revue de la Médecine Générale, 2017; 346:16-17.
5 S. Koning, R. van der Sande, AP. Verhagen, et al. Interventions for impetigo. Cochrane Database Systematic Review, 2012;1:CD003261. DOI: 10.1002/14651858.CD003261.pub3.
Bacteriële huidinfecties. Farmacotherapeutisch Kompas, via https://www.farmacotherapeutischkompas.nl/bladeren/indicatieteksten/bacteriele_huidinfecties. Consulté pour la dernière fois le 31/05/2018.
7 Guide belge des traitements anti-infectieux en pratique ambulatoire. BAPCOC 2012.
8 Topical antibiotics for impetigo: a review of the clinical effectiveness and guidelines. CADTH: rapid response report: summary with critical appraisal, 2017.