Voyages et Médicaments
Prévention de la malaria (mise à jour mai 2019)

– La décision d’instaurer ou non une chimioprophylaxie en prévention de la malaria ainsi que le choix du médicament doivent se faire de manière individuelle pour chaque voyageur, en tenant compte de facteurs tels que le pays et la région de destination. Sur la carte mondiale de la malaria de 2019 du Groupe d’Etude Scientifique de la Médecine des Voyages, il y a cinq zones, allant de « pas de risque de malaria » à « risque très élevé de malaria », chacune avec une couleur qui correspond aux mesures préventives recommandées.
– La chimioprophylaxie chez les femmes enceintes ou allaitantes mérite une attention particulière.
– Le tableau indique la posologie et la durée du traitement des différents médicaments utilisés dans la prévention de la malaria (hydroxychloroquine, atovaquone + proguanil, doxycycline, méfloquine).
– Dans des cas exceptionnels, lors de voyages dans des régions à haut risque, il peut être indiqué d’avoir un traitement d’urgence à disposition ; il est alors souhaitable d’obtenir les conseils d’un spécialiste avant le départ.
– Des mesures préventives contre les piqûres de moustiques (entre autres moustiquaires et répulsifs) entre le lever et le coucher du soleil restent essentielles, même lorsqu’une prophylaxie médicamenteuse est utilisée. En ce qui concerne les répulsifs, cliquez ici.

La malaria peut mettre la vie en danger, et l’éviction des piqûres de moustiques ainsi que la chimioprophylaxie sont donc très importants lors de certains voyages. Dans des cas exceptionnels, lors de voyages dans des régions à risque, il peut également être recommandé d’avoir un traitement d’urgence à disposition ; il est alors souhaitable de consulter un spécialiste avant le départ.

Eviction des piqûres de moustiques

  • Le moustique anophèle ne pique qu’entre le coucher et le lever du soleil. Les mesures suivantes contre les piqûres de moustiques sont prioritaires et efficaces: le soir, porter des vêtements clairs couvrant le plus possible les bras et les jambes; dormir sous une moustiquaire imprégnée de perméthrine ou de deltaméthrine (à moins que les fenêtres et ouvertures ne soient protégées par des moustiquaires); enduire toutes les 4 à 6 heures les parties découvertes du corps avec un insectifuge (répulsif; le mieux étudié: DEET; voir article “Bon usage des répulsifs”).

  • Ces mesures restent importantes, même lorsque une prophylaxie médicamenteuse est utilisée.

Chimioprophylaxie

  • La chimioprophylaxie réduit fortement le risque de maladie grave due à Plasmodium falciparum (la variante la plus dangereuse), mais elle ne prévient ni les infections ni les accès tardifs par P. vivax ou P. ovale.

  • La décision d’instaurer ou non une chimioprophylaxie et le choix du médicament doivent se faire de manière individuelle pour chaque voyageur, en tenant compte de facteurs tels que le pays et la région de destination. Sur la carte mondiale de la malaria de 2019 du Groupe d’Etude Scientifique de la Médecine des Voyages, il y a cinq zones, allant de "pas de risque de malaria" à "risque très élevé de malaria", chacune avec une couleur qui correspond aux mesures préventives recommandées (auparavant il y avait trois zones: A, B et C).

    • Pour les zones à "risque de malaria limité", les mesures anti-moustiques (par exemple l’utilisation de répulsifs, voir "Bonne utilisation des répulsifs") et awareness (c.-à-d. qu’en cas de fièvre, on pense à la malaria et on fait effectuer un test de malaria dans les 24 heures, et ce jusqu’à 3 mois après le retour) sont suffisantes.

    • Pour les zones à “risque de malaria modéré ou saisonnier”, les mesures anti-moustiques et awareness sont généralement suffisantes, sauf chez les personnes  présentant un risque élevé de complications liées à la malaria (jeunes enfants, personnes âgées, femmes enceintes, patients atteints d’hypo- ou d’asplénie, d’immunosuppression ou de comorbidité complexe) ou voyageant dans des conditions de voyage à risque (p.ex. nuits dans la jungle), chez lesquels la chimioprophylaxie est toutefois recommandée. Pour les zones à risque saisonnier, la chimioprophylaxie sera proposée pendant la saison des pluies.

    • Pour les zones à haut risque et très haut risque (entre autres en Afrique subsaharienne), la chimioprophylaxie est toujours indiquée en plus des mesures anti-moustiques et awareness.

    • Pour des avis détaillés et actualisés par pays, voir https://www.itg.be/F/conseils-de-voyages > "Choisissez un pays".

  • Les médicaments utilisés pour la chimioprophylaxie sont les suivants. chloroquine (plus disponible en Belgique), hydroxychloroquine, doxycycline ou l’association atovaquone + proguanil, éventuellement méfloquine. En raison de résistance, la chloroquine et l’hydroxychloroquine n’ont qu’une place très limitée. La méfloquine est de moins en moins utilisée en raison d’effets indésirables potentiels et (pour l’Indochine) en raison de la résistance. Pour la posologie et la durée du traitement, voir le tableau.

    La méfloquine est de moins en moins utilisée en chimioprophylaxie, surtout  lorsque la personne ne l’a jamais prise auparavant, principalement en raison des effets indésirables potentiels: insomnie et rêves anormaux (incidence > 10%); vertiges, effets indésirables psychiques (entre autres anxiété, dépression, confusion et hallucinations) (incidence 1 à 10%) et psychose, convulsions et idées suicidaires (incidence estimée à 0,01-0,02%). La méfloquine a une longue demi-vie, et des effets indésirables peuvent survenir ou persister pendant plusieurs semaines après la dernière dose. Des antécédents de troubles neuropsychiatriques constituent une contre-indication. Depuis 2014, il est obligatoire de donner une "carte d’avertissement"2 à tous les patients qui prennent de la méfloquine. Si la méfloquine n’a jamais été utilisée auparavant, elle doit être instaurée comme test pour voir si elle est bien tolérée, et ce de préférence 2 à 4 semaines avant le départ. Par ailleurs, dans les zones fortement endémiques de l’Indochine (les régions frontalières de la Birmanie avec la Thaïlande et la Chine, entre la Thaïlande et le Cambodge, entre le Vietnam et le Cambodge), il faut tenir compte des pourcentages de résistance à la méfloquine supérieurs à 50%.
  • Femmes enceintes. En général, il est déconseillé aux femmes enceintes d’entreprendre des voyages vers des régions où la malaria est endémique et où le risque d’infection est élevé, en particulier vers les régions où la résistance aux médicaments antimalariques plus anciens est importante. Si un voyage a tout de même lieu, une prévention maximale est recommandée, d’une part par l’utilisation de mesures préventives contre les moustiques (entre autres moustiquaires et répulsifs) et d’autre part par une chimioprophylaxie. Chez les femmes enceintes, les médicaments suivants peuvent être utilisés: chloroquine, hydroxychloroquine, méfloquine, atovaquone + proguanil. La doxycycline peut, pour des raisons impérieuses et lorsqu’aucune alternative n’est disponible, être utilisée pendant le 1er trimestre, mais elle est contre-indiquée pendant le 2ème et 3ème trimestre.2

    En ce qui concerne la grossesse et le choix de la prophylaxie antimalarique, il y a lieu de tenir compte des mesures suivantes.3
    1. Les femmes qui sont enceintes et voyagent vers une région endémique.
    - Chloroquine, hydroxychloroquine et méfloquine: elles peuvent être utilisées quel que soit le stade de la grossesse. Aucun effet tératogène ou embryotoxique n’a été mis en évidence. Pour l’hydroxychloroquine, les données sont limitées.
    - Association atovaquone + proguanil: les données disponibles n’indiquent pas de risque accru pour l’enfant à naître mais les données sont limitées, certainement pour l’atovaquone. Pour raison impérieuse et s’il n’existe pas d’alternative, cette association peut être utilisée, quel que soit le stade de la grossesse.
    - Doxycycline: son utilisation pendant le 1er trimestre de la grossesse est acceptable pour des raisons impérieuses et si aucune alternative n’est disponible (aucun indice d’un effet nocif); son utilisation pendant les 2ème et 3ème trimestres est, en fonction de la source, déconseillée ou contre-indiquée, et ce en raison des effets nocifs sur le développement ultérieur des os et des dents chez le fœtus.
    2. Les femmes qui tombent enceintes pendant un traitement préventif antimalarique.
    Aucun des médicaments antimalariques à titre préventif (chloroquine, hydroxychloroquine , méfloquine, atovaquone + proguanil, doxycycline) ne justifie d’envisager une interruption de grossesse.
  • Période d’allaitement

    • L’utilisation par la mère d’une prophylaxie médicamenteuse contre la malaria ne protège pas l’enfant allaité.

    • Chez les femmes qui allaitent, la chloroquine, l’hydroxychloroquine et la doxycycline (pour la doxyciycline du moins utilisation à court terme, c.-à-d. < 3 semaines) peuvent être utilisées. Les données avec la méfloquine sont limitées. Il n’y a pas de données avec l’atovaquone + le proguanil (d’après certaines sources à n’utiliser que lorsque l’enfant allaité pèse 5 kg ou plus).

  • Les personnes issues de l’immigration qui résident depuis un certain temps déjà en Belgique, sous-estiment souvent le risque de malaria lors de voyages vers leur pays d’origine : l’immunité qu’une personne immigrée a éventuellement développée antérieurement disparaît  lorsqu’elle vit quelque temps (on suppose déjà après environ six mois, et certainement après une ou plusieurs années) dans un pays non endémique. Ces personnes doivent donc, comme les touristes, appliquer les mesures de protection en cas de séjour dans leur pays d’origine.

  • En cas d’apparition de fièvre jusqu’à 3 mois après un voyage en zone tropicale, il faut toujours penser à la malaria!

Tableau 11b. Médicaments utilisés dans la prévention de la malariaa
 
  Durée de traitement Adulte Enfant
Sulfate d'hydroxychloroquineb

à partir d’une semaine avant l'arrivée jusqu’à 4 semaines après avoir quitté la région endémique

400 mg par semaine en une prise (ou 200 mg par jour pendant 2 jours consécutifs par semaine pour une meilleure tolérance à partir de 30 kg: 6,5 mg/kg par semaine en une prise
Association fixe atovaquone + proguanil à partir du jour précédant l'arrivée jusqu’à 1 semaine après avoir quitté la région endémiquec 1 compr. par jour (au cours du repas) par jour (au cours du repas):
- 5-8 kg: ½ compr. Junior
- 8-10 kg: ¾ compr. Junior
- 11-20 kg: ¼ compr. pour adulte ou 1 compr. Junior
- 21-30 kg: ½ compr. pour adulte ou 2 compr. Junior
- 31-40 kg: ¾ compr. pour adulte ou 3 compr. Junior
 
Doxycycline à partir du jour précédant l'arrivée jusqu’à 4 semaines après avoir quitté la région endémique 100 mg par jour en une prise (contre-indiqué le 2ème et 3ème trimestres de la grossesse; emploi pendant le 1er trimestre seulement pour raison impérieuse) - < 8 ans: contre-indiqué
- ≥ 8 ans: 1,5 mg/kg (max. 100 mg) par jour en une prise
Méfloquined à partir de 2 à 4 semaines avant l'arrivée jusqu’à 4 semaines après avoir quitté la région endémiquee 250 mg par semaine en une prise 4 à 5 mg/kg par semaine en une prise (préparation magistrale à base de la spécialité Lariam®) ou diviser le comprimé : 5-10 kg :1/8 compr. ; 11-20 kg :1/4 compr. ; 21-30 kg :1/2 compr.31-45 kg :3/4 compr. ; > 45 kg :1 compr.)
a Pour la carte mondiale de la malaria de l’Organisation Mondiale de la Santé, voir https://www.itg.be/Files/docs/Reisgeneeskunde/MalariaWorld2019.jpg
b Seulement dans les régions où il n’y a pas de résistance à la chloroquine
c Si la prise de l’association atovaquone + proguanil ne débute que durant le séjour dans une région où la malaria est endémique ou si la prise a été interrompue, il convient de continuer à la prendre jusqu’à 4 semaines (et non pas 7 jours) après avoir quitté la région endémique.
d Depuis 2014, une “carte de surveillance du patient” doit être transmise à tout patient prenant de la méfloquine. Les coordonnées du médecin s’y retrouvent également, utiles en cas d'effets indésirables.
e Cette recommandation a pour objectif de détecter les effets indésirables de la méfloquine et d’atteindre des taux plasmatiques suffisants. Si ce délai de 2 à 4 semaines n’est plus possible, le traitement doit quand même être débuté le plus rapidement possible. Au besoin, la méfloquine peut être prise à raison d'1 comprimé par jour pendant les trois jours précédant le départ, puis 1 comprimé par semaine.

Sources générales

Site Web de l’Institut de Médecine Tropicale:
– www.medecinedesvoyages.be > Maladies et vaccinations > Malaria (paludisme) (plusieurs documents).
– https://www.itg.be/F/conseils-de-voyages/votre-sante-durant-le-voyage

Sources spécifiques

1 https://www.itg.be/Files/docs/Reisgeneeskunde/NNOODMAL.pdf
2 Carte d’avertissement Lariam® disponible en cliquant sur le "triangle orange" en regard de la spécialité Lariam® (méfloquine) dans le Répertoire ou directe via https://www.afmps.be/sites/default/files/downloads/Lariam%20patient%20FR.pdf
3 http://www.itg.be/Files/docs/Reisgeneeskunde/nzwangerschap.pdf; Drugs in pregnancy and lactation (G. Briggs en R. Freeman; 11ème édition; version en ligne); http://lecrat.fr; Lareb: geneesmiddelen bij zwangerschap (https://www.lareb.nl/teratologie-nl/zwangerschap/)
4 https://www.itg.be/Files/docs/Reisgeneeskunde/FR_chap%2010%20-%20Gross%20-%20NEW%202016relu.pdf ; Drugs in pregnancy and lactation (G. Briggs en R. Freeman; 11ème édition; version en ligne); http://lecrat.fr; Lareb: geneesmiddelen bij borstvoeding (https://www.lareb.nl/teratologie-nl/borstvoeding/)