Influenza 2017-2018

- Pour la saison 2017-2018, deux vaccins tétravalents et un vaccin trivalent contre l’influenza seront disponibles ; ce sont tous des vaccins « inactivés ». Chez l’adolescent et l’adulte, il n’y a pas d’arguments cliniques pertinents pour privilégier un vaccin trivalent ou un vaccin tétravalent; chez l’enfant, un vaccin tétravalent est à préférer. La vaccination doit être effectuée en priorité chez les personnes présentant un risque de complications.
- En Belgique et ailleurs, la vaccination contre l’influenza est recommandée chez les personnes qui sont actives dans le secteur des soins de santé, avec comme principal objectif de protéger les patients vulnérables. Selon deux analyses récentes, les preuves étayant cette recommandation ne sont pas solides. Les données actuelles sont d’une part insuffisantes pour imposer une vaccination obligatoire au personnel soignant, mais d’autre part elles ne permettent pas non plus de rejeter les initiatives encourageant la vaccination volontaire.
- Une étude néerlandaise conclut que le type de virus circulant dominant et l’adéquation avec les souches vaccinales constituent des facteurs déterminants pour l’efficacité du vaccin contre l’influenza. Une adéquation n’était présente que dans 4 des 11 saisons examinées dans cette étude, avec durant ces saisons une efficacité de 40 %. 

Composition et spécialités des vaccins contre l’influenza 2017-2018

Pour la saison grippale 2017-2018, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) recommande la composition suivante.

Vaccins trivalents contre l’influenza

  • A/Michigan/45/2015 (H1N1)pdm09 ou une souche apparentée

  • A/Hong Kong/4801/2014 (H3N2) ou une souche apparentée

  • B/Brisbane/60/2008 ou une souche apparentée (appelée « Ligne Victoria B»)

Vaccins tétravalents contre l’influnenza
En plus des trois composantes des vaccins trivalents

  • B/Pukhet/3073/2013 ou une souche apparentée (appelée “ligne B-Yamagata”).

Par rapport à la saison grippale 2016-2017, la souche de la composante H1N1 a été adaptée ; les autres composantes sont inchangées. Toutes les spécialités (à base de virus influenza inactivé) répondent aux normes de l’OMS pour 2017-2018. Il s’agit des spécialités suivantes.

  • Vaccin trivalent : Influvac S®.

  • Vaccins tétravalents : α-RIX-Tetra®, Vaxigrip Tetra®.

Ces vaccins seront mentionnés sur notre site Web lors de la mise à jour d’août 2017.
Lorsque le médecin mentionne sur la prescription “Vaccin contre l’influenza” ou “Vaccin contre la grippe” au lieu d’un nom de spécialité, le pharmacien peut délivrer soit l’un des vaccins tétravalents soit le vaccin trivalent.

Vaccin trivalent ou tétravalent ?

  • Chez l’adolescent et l'adulte, il n’y a pas d’arguments cliniques pertinents pour privilégier un vaccin trivalent ou un vaccin tétravalent. Les deux types de vaccins offrent une protection équivalente contre l’influenza A, le type le plus dangereux chez l’adulte.

  • Chez l'enfant, il y a toutefois des arguments qui incitent à choisir un vaccin tétravalent : chez l’enfant, l’impact clinique de l’infection par le virus de l’influenza B est plus important que chez l’adulte, et les enfants n’ont pas encore (ou presque pas) eu de contact avec l’influenza de type B, et ils n’ont donc pas encore développé d’immunité contre l’influenza de type B.

  • Dans son avis pour la saison grippale 2017-2018, le Conseil Supérieur de la Santé n’exprime pas clairement une préférence dans le choix entre un vaccin trivalent ou un vaccin tétravalent, sauf qu’un vaccin tétravalent est recommandé pour les enfants de plus de 3 ans appartenant aux groupes à risque et pour les femmes enceintes.

    - La recommandation du CSS de n’utiliser les vaccins tétravalents qu’à partir de l’âge de 3 ans repose sur l’information fournie dans les RCP des vaccins α-Rix-Tetra® et Vaxigrip Tetra®: on y mentionne que la sécurité et l’efficacité chez les enfants de moins de 3 ans n’ont pas été établies. Dans le RCP du vaccin trivalent, on mentionne qu’il peut être utilisé à partir de l’âge de 6 mois, et que « chez les enfants de 6 mois à 35 mois, les données cliniques sont limitées ». D’un point de vue scientifique, il n’y a pas d’arguments évidents pour penser que, chez les enfants en très bas âge, les vaccins tétravalents soient moins sûrs que les vaccins trivalents. Dans des études sur d’autres vaccins tétravalents, non commercialisés en Belgique (dont certains peuvent, selon le RCP, être utilisés dès l’âge de 6 mois), on a constaté peu de différences en termes d’innocuité par rapport aux vaccins trivalents, sinon une légère augmentation des réactions au site d’injection avec le vaccin tétravalent (Source: Centers for Disease Control and Prevention, Etats-Unis, sur  www.cdc.gov/mmwr/volumes/65/rr/rr6505a1.htm).
    - La recommandation d’utiliser de préférence un vaccin tétravalent également chez la femme enceinte se base sur l’hypothèse que la vaccination de la femme enceinte confère une protection chez le nouveau-né (voir à ce sujet aussi les Folia de novembre 2013 «Vaccination contre la grippe chez les femmes enceintes »). 

Vaccination prioritaire des groupes à risque

La vaccination doit se faire prioritairement dans les groupes à risque. Les groupes à risque définis par le Conseil Supérieur de la Santé (CSS) pour la saison 2017-2018 ne sont pas modifiés par rapport à la saison précédente, et sont repris dans le Répertoire Commenté des Médicaments (chapitre 12.1.1.5). Le groupe-cible principal de la vaccination est constitué de personnes à risque de complications grippales.

Le Conseil Supérieur de la Santé a défini des groupes à risque pour la grippe saisonnière, et ce selon un ordre de priorité dans le cas où une pénurie du vaccin contre l'influenza surviendrait. Il s'agit des groupes suivants.
- Groupe 1: personnes avec un risque accru de complications en cas de grippe, c.-à-d.
    • les femmes enceintes au deuxième ou troisième trimestre de la grossesse;
    • les patients à partir de l'âge de 6 mois atteints d'une affection chronique sous-jacente (même stabilisée) pulmonaire, cardiaque, hépatique ou rénale, d'une maladie métabolique ou neuromusculaire, ou de troubles de l'immunité (naturels ou induits);
    • les personnes à partir de 65 ans;
    • les personnes vivant en institution;
    • les enfants de 6 mois à 18 ans sous traitement chronique par l'acide acétylsalicylique.
- Groupe 2: les personnes actives dans le secteur des soins de santé.
- Groupe 3: toutes les personnes vivant sous le même toit que
    • les personnes à risque du groupe 1;
    • les enfants de moins de 6 mois.
- Le Conseil Supérieur de la Santé recommande la vaccination aussi chez toutes les personnes âgées de 50 à 64 ans, même si elles ne présentent pas d'affection à risque, surtout si elles fument, consomment de l'alcool de façon excessive ou sont obèses.

En outre, le Conseil Supérieur de la Santé recommande la vaccination entre autres également pour les « personnes qui sont actives dans le secteur des soins de santé ». 

Vaccination contre l’influenza chez les personnes actives dans le secteur des soins de santé

En Belgique, comme dans de nombreux autres pays, il est recommandé au personnel soignant de se faire vacciner contre l’influenza, avec comme principal objectif de protéger les patients vulnérables. Les études le plus souvent citées pour étayer cette recommandation concernent quatre études randomisées en grappes, c.-à-d. des études dans lesquelles l’unité de randomisation n’est pas un individu mais un groupe d’individus, la vaccination étant réalisée par exemple dans certaines institutions et pas dans d’autres. Les quatre études publiées à ce sujet ont été incluses dans une Cochrane Review1 (dernière mise à jour 2016) concernant l’effet de la vaccination contre l’influenza du personnel soignant dans des institutions de soins pour personnes de plus de 60 ans, sur l’apparition de la grippe ou des complications liées à la grippe chez les résidents ; elles sont également décrites dans une analyse critique dans PlosOne2 (2017). La conclusion, tant de la Cochrane Review que de l'analyse PlosOne est qu’il n’y a pas de preuve convaincante d’une protection et que les quatre études présentent de sérieuses limites méthodologiques (risque élevé de biais, puissance statistique insuffisante pour les critères d’évaluation cliniques). Sur base de ces études, il n’est pas possible de donner un avis fondé quant à l’effet de la vaccination du personnel soignant sur la morbidité et la mortalité liées à l’influenza chez les patients vulnérables. Des études de qualité permettant de mieux évaluer l’effet de la vaccination s’avèrent nécessaires. Les auteurs de l’article dans PlosOne concluent que les preuves ne sont pas suffisantes pour imposer une vaccination obligatoire au personnel soignant, mais qu’elles ne permettent pas non plus de rejeter les initiatives encourageant la vaccination volontaire.

- La Cochrane Review1 n’a pas montré d’effet statistiquement significatif de la vaccination contre l’influenza du personnel soignant sur l’apparition d’une infection grippale confirmée en laboratoire ou de complications dues à la grippe chez les résidents (infection des voies respiratoires inférieures, hospitalisation en raison d’une affection respiratoire, décès due à une affection respiratoire, mortalité globale). Les auteurs de la Cochrane Review attirent l’attention sur le risque élevé de biais dans les études (surtout en raison du doute quant à la mise en aveugle, le taux d’abandons élevé et la vaccination incomplète dans le groupe d’intervention) et sur la « puissance » insuffisante pour les critères d’évaluation cliniques, d’où la qualité de l’évidence qualifiée de « modérée », « faible » ou « très faible ». Les auteurs de la Cochrane Review concluent donc que des preuves de bonne qualité sur le bénéfice de la vaccination du personnel soignant sont nécessaires. Des preuves de bonne qualité sont également nécessaires quant à l’efficacité de l’association de la vaccination à d’autres mesures pouvant influencer l’incidence de la grippe dans une plus ou moins large mesure : vaccination des résidents, lavage des mains, port d’un masque, détection précoce de grippe confirmée en laboratoire, quarantaine d’une section ou d’une institution en cas d’apparition de foyers d’influenza, instauration immédiate d’antiviraux, maintien à domicile des personnes travaillant dans le secteur des soins de santé qui présent un syndrome grippal, et éviter l’admission de nouveaux résidents pendant une épidémie.
- Selon les auteurs de l’analyse dans Plos One2 l’effet protecteur de la vaccination du personnel soignant sur la morbidité et la mortalité liées à la grippe chez les résidents est fortement surestimé dans les quatre études concernées, en raison du protocole de ces études. Selon les auteurs de l’analyse, de nombreuses incertitudes persistent quant au pourcentage de morbidité et mortalité pouvant être évité chez les résidents par la vaccination du personnel soignant. Les auteurs concluent que les preuves actuelles ne sont pas suffisantes pour imposer une vaccination obligatoire au personnel soignant, mais qu’elles ne permettent pas non plus de rejeter les initiatives encourageant la vaccination volontaire.

Etudes d’efficacité de la vaccination contre l’influenza aux Pays-Bas

Une étude cas-témoins, réalisée sur base de données collectées en première ligne aux Pays-Bas relatives à 11 saisons grippales (2003/2004 à 2013/2014), a évalué la relation entre les virus circulants contre l’influenza, l’adéquation avec le vaccin et l’efficacité du vaccin contre l’influenza (définie comme la protection contre une infection grippale confirmée en laboratoire).3 Malgré les limites inhérentes à cette étude observationnelle, certains résultats s’avèrent intéressants. Une « inadéquation » a été constatée dans 7 des 11 saisons, ce qui signifie que les virus influenza circulants ne correspondaient pas aux souches d’influenza présentes dans le vaccin. Dans les saisons présentant une inadéquation, la protection était limitée : seulement de 20 % (statistiquement non significative) ; dans les saisons présentant une adéquation complète ou partielle, la protection était de 40 % (statistiquement significative). De manière globale, le vaccin contre l’influenza était plus efficace contre les virus de l’influenza A/H1N1 et A/H1N1/pdm09 et les deux lignes du virus de l’influenza de type B, et moins efficace contre les virus de l’influenza H3N2. La protection du vaccin contre l’influenza était surtout faible lors des saisons où les virus A/H3N2 constituaient les virus circulants dominants. Les chercheurs concluent qu’il est urgent d’améliorer les procédures de production des vaccins et qu’une meilleure compréhension des facteurs déterminant la protection du vaccin contre des infections dues au virus de l’influenza A/H3N2, s’avère nécessaire.

- Les données utilisées dans cette étude ont été collectées dans des stations de jaugeage de NIVEL Zorgregistraties Eerste Lijn. Les « cas » dans cette étude cas-témoin (case-control study) étaient des personnes présentant un syndrome pseudo-grippal ou une infection aiguë des voies respiratoires chez lesquels un écouvillon au niveau du nez ou de la gorge s’avérait positif pour l’influenza A ou B (n = 1.422). Les « contrôles » étaient des personnes présentant un syndrome pseudo-grippal ou une infection des voies respiratoires chez lesquelles l’écouvillon était négatif (n = 3.410).
- L’efficacité du vaccin était exprimée comme IVE (influenza vaccine effectiveness) , c.-à-d. (1 - odds ratio) x 100 %, où l’odds ratio (OR) est le ratio entre la chance de vaccination contre la grippe entre les « cas » et les « contrôles ».
- L’IVE sur l’ensemble des saisons était de 29% (IC à 95% : 11 à 43).
- L’IVE s’élevait à 40% (IC à 95% : 18 à 56) lors des saisons présentant une inadéquation complète ou partielle (4 des 11 saisons).
- L’IVE s’élevait à 20 % (IC à 95 % : -5 à 38) lors des saisons présentant une inadéquation (7 des 11 saisons).
- L’IVE sur l’ensemble des saisons pour les différents sous-types se présentait de la façon suivante (indépendamment qu’il y ait adéquation ou inadéquation).
    • Contre l’influenza A/H1N1 (jusqu’à la saison 2008-2009 incluse): 77% (IC à 95% : 37 à 92),
    • Contre l’influenza A/H1N1/pdm09 (à partir de la saison 2009-1010): 47% (IC à 95% : 22 à 64)
    • Contre l’influenza A/H3N2: 20% (IC à 95% : -4 à 38)
    • Contre l’influenza B: 64% (IC à 95% : 50 à 74).
 

Sources spécifiques

1 Thomas RE, Jefferson T en Lasserson TJ. Influenza vaccination for healthcare workers who care for people aged 60 or older living in long-term care institutions. Cochrane Database of Systematic Reviews 2016, Issue 6. Art. No.: CD005187. (doi: 10.1002/14651858.CD005187.pub5.)
2 De Serres G, Skowronski DM, Ward BJ, Gardam M, Lemieux C, Yassi A, et al. (2017) Influenza Vaccination of Healthcare Workers: Critical Analysis of the Evidence for Patient Benefit Underpinning Policies of Enforcement. PLoS ONE 12(1): e0163586. (doi:10.1371/journal.pone.0163586); via http://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0163586
3 van Doorn E, Darvishian M, Dijkstra F, Bijlsma MJ et al. Effectiviteit van influenzavaccinatie in Nederland*. Dominant circulerend virustype en match met vaccinstam zijn bepalend. Ned Tijdschr Geneeskd. 2017;161:D1648
Egalement paru dans: Darvishian M, Dijkstra F, van Doorn E, Bijlsma MJ et al. Influenza Vaccine Effectiveness in the Netherlands from 2003/2004 through 2013/2014: The Importance of Circulating Influenza Virus Types and Subtypes. PLoS ONE 2017;12(1):e0169528 (via https://doi.org/10.1371/journal.pone.0169528)