Prise en charge du psoriasis en plaques (Mis à jour le 22/10/2019)

Le psoriasis en plaques (psoriasis vulgaire) est une affection cutanée chronique, auto-immune, érythématosquameuse, dont les traitements disponibles sont uniquement symptomatiques. La base de la prise en charge du psoriasis repose sur l’application d’émollients et d'un traitement local par des corticostéroïdes, associés ou non à des analogues de la vitamine D. L’acide salicylique a une place en tant qu’adjuvant dans le traitement de l’hyperkératose, en particulier dans le psoriasis du cuir chevelu. De plus, l'acide salicylique augmente la pénétration cutanée des corticostéroïdes. Les préparations à base de goudron n’ont qu’une place très limitée et le dithranol n’est plus recommandé. Si l’efficacité du traitement local s’avère insuffisante ou que la surface à traiter est importante, on peut se tourner vers la photothérapie (premier choix : rayons UVB). En cas de psoriasis modéré à sévère, le méthotrexate est le premier choix de traitement. La ciclosporine est une alternative. En cas de réponse insuffisante ou de contre-indication, un agent biologique (ou l’aprémilast) peut être utilisé. Certaines recommandations récentes (2019) émettent des premiers choix de traitement parmi les agents biologiques. Le CBIP est d’avis que les données sur lesquelles sont basées ces affirmations ne permettent pas de faire ces choix. Les corticostéroïdes oraux n’ont pas de place dans le traitement du psoriasis.

Le psoriasis est une affection cutanée inflammatoire chronique, touchant environ 1 à 3 % de la population européenne1. Le psoriasis en plaques ou psoriasis vulgaire est la forme la plus courante de psoriasis, affectant 90% des patients et caractérisée par des épisodes d’exacerbation et de rémission2

Le psoriasis en plaques se caractérise par des plaques érythématosquameuses, souvent accompagnées de démangeaisons lors de l’apparition de ces plaques. Les lésions cutanées surviennent plus fréquemment sur les faces externes des coudes et des genoux, le cuir chevelu et la région lombo-sacrée. On parle de forme modérée de psoriasis en plaques lorsque la surface totale des lésions dépasse 5 % de la surface corporelle, de forme sévère lorsque la surface totale dépasse 10 %.2


 

Le traitement médicamenteux du psoriasis en plaques est symptomatique et a pour but de diminuer l’ampleur des lésions cutanées. Aucun traitement ne permet une guérison définitive ou n’a un effet sur l’évolution à long terme de cette affection. Référer le patient à un spécialiste est indiqué lors de l’instauration d’un traitement chez un enfant, lorsque le traitement local s’avère inefficace et en cas de formes modérées à sévères de psoriasis en plaques.2,3 

Autres formes de psoriasis :
  • Le psoriasis en gouttes touche plus souvent les enfants et les jeunes adultes et est caractérisé par la présence de papules au niveau du tronc et des membres. Il peut être précédé d’une infection à streptocoques au niveau de la gorge ou des amygdales. Chez les enfants et les jeunes adultes, le psoriasis en gouttes guérit en général spontanément en quelques semaines tandis que chez les adultes, il prend souvent un caractère plus chronique évoluant vers le psoriasis en plaques.
  • Le psoriasis pustuleux est une forme rare de psoriasis caractérisée par l’apparition de pustules pouvant confluer. Il peut être local (surtout dans la région palmoplantaire) ou généralisé.
  • L’érythrodermie ou psoriasis érythrodermique est très rare et caractérisé par un érythème généralisé avec desquamations.
  • L’arthrite psoriasique survient dans 5 à 40 % des cas de psoriasis et atteint surtout les articulations des doigts, des orteils et des genoux. En cas de plaintes importantes, une prise en charge par un rhumatologue est nécessaire. 80 % des cas d’arthrite psoriasique au niveau des doigts vont de pair avec une atteinte des ongles.


Un patient atteint par une de ces formes de psoriasis doit être référé à un spécialiste.2

Cet article traite uniquement de la prise en charge du psoriasis en plaques.

Traitement local

Emollients

L’application régulière d’émollients (le plus souvent des crèmes hydrophiles à base de glycérol, de cétomacrogol ou d’urée mais aussi des crèmes plus grasses comme par exemple le cérat réfrigérant, appelé aussi cold cream) constitue la base de la prise en charge du psoriasis, quel que soit le traitement médicamenteux utilisé, aussi bien pendant les périodes d’exacerbation que les périodes de rémission. Son but est d’hydrater la peau, de renforcer la barrière cutanée et de diminuer les démangeaisons et la desquamation de la peau. Bien que la recommandation d’utiliser des émollients dans le traitement du psoriasis repose surtout sur l’expérience dans la pratique, elle est justifiée vu le risque très limité d’effets indésirables et le bénéfice attendu ; ils permettraient de diminuer le recours aux corticostéroïdes en cas de psoriasis léger. Le choix de l’émollient se fera principalement en fonction de la préférence du patient et de la localisation des lésions. L’émollient est à appliquer au moins une heure après le traitement local actif.2,4,5,6

Corticostéroïdes

Les corticostéroïdes par voie locale restent le traitement médicamenteux topique de premier choix.2,3 Il existe des preuves d’efficacité pour les corticostéroïdes locaux en monothérapie dans le traitement du psoriasis en plaques chez l’adulte. Les preuves d’efficacité en cas d’usage prolongé sont limitées. On manque d’études concernant leur utilisation chez les enfants.2,6,7

  • Une Revue Cochrane4 de bonne qualité a comparé l’efficacité des différents traitements locaux utilisés dans le psoriasis en plaques (corticostéroïdes, analogues de la vitamine D, préparations à base de goudron, dithranol, acide salicylique). Quasi toutes les études portaient sur des sujets adultes et la durée moyenne de traitement était de 7 semaines (1 à 52 semaines). Les critères d’évaluation primaires sont diverses échelles utilisées pour évaluer la sévérité ou l’évolution du psoriasis (IAGI ou IGA, TSS, PASI, PAGI ou PGA). Ces échelles sont rassemblées en un critère d’évaluation primaire combiné qui est exprimé en Standardised Mean Difference (SMD).
    • IAGI: Investigator’s Assessment of Overall Global Improvement
    • IGA: Investigator’s Global Assessment of Disease Severity
    • TSS: Total Severity Scores 
    • PASI: Psoriasis Area and Severity Index 
    • PAGI: Patient Assessment of overall Global Improvement
    • PAG: Patient Global Assessment of Disease Severity
  • Les corticostéroïdes montrent une efficacité supérieure au placebo : SMD de -0,89 (IC 95% -1,06 à -0,72, 14 études, 2011 participants) pour les corticostéroïdes puissants et de -1,56 (IC 95% -1,87 à -1,26, 10 études, 1264 participants) pour les corticostéroïdes très puissants.
  • Le Tableau 1. (voir plus loin) reprend les données d’efficacité des analogues de la vitamine D et des corticostéroïdes.

Le choix de la puissance du corticostéroïde à utiliser (voir Note au chapitre 15.2. du Répertoire) dépend principalement de l’âge du patient et de la localisation des lésions cutanées. Les étapes de la prise en charge du psoriasis en plaques par un traitement local sont décrites plus loin.
Lors d’une application locale, un risque d’apparition d’effets indésirables locaux et systémiques n’est pas à exclure (voir voir chapitre 15.2. du Répertoire). Ce risque augmente notamment avec la durée du traitement et l’étendue des lésions à traiter. Lorsque la posologie (décrite ci-dessous) est scrupuleusement respectée, ce risque est limité.2

Analogues de la vitamine D

Il existe également des preuves d’efficacité pour les analogues de la vitamine D en monothérapie dans le traitement du psoriasis en plaques chez l’adulte. Les preuves d’efficacité en cas d’usage prolongé sont limitées. Vu leur début d’action lent, ils sont souvent associés à un corticostéroïde (voir Répertoire chapitre 15.7.). Les analogues de la vitamine D ne semblent pas plus efficaces que les corticostéroïdes puissants (p.ex. valérate de bétaméthasone) et très puissants (p.ex. dipropionate de bétaméthasone).2,4 Ils exposent à des effets indésirables locaux tels une irritation et une sensation de brûlure.4 Le risque d’apparition d’effets indésirables à court terme est plus élevé avec les analogues de la vitamine-D qu’avec un corticostéroïde puissant. Par contre, étant donné que la plupart des études sont de courte durée, ce risque à long terme ne peut être défini. On manque d’études concernant l’utilisation des analogues de la vitamine D chez les enfants.2

  • Le Tableau 1. (voir plus loin) reprend les données d’efficacité des analogues de la vitamine D et des corticostéroïdes.
  • Dans la Revue Cochrane de Mason et al. 20134 les analogues de la vitamine D se sont montrés plus efficaces que le placebo : SMD de -0,96 (IC 95% -1,15 à -0,77) pour le calcipotriol, SMD de -0,73 (IC 95% -1,09 à -0,37) pour le tacalcitol, SMD de -0,92 (IC 95% -1,54 à -0,29) pour le calcitriol.
  • Les études de bonne qualité comparant l’efficacité des analogues de la vitamine D et des corticostéroïdes sont limitées. Plusieurs études montrent une différence d’efficacité statistiquement significative en défaveur de l’analogue de la vitamine D: une analyse de trois études montre un effet légèrement inférieur du calcipotriol par rapport au dipropionate de bétaméthasone (SMD 0,43, IC 95% 0,28 à 0,58 ; n=1728); une autre analyse de deux études montre un effet inférieur (à la limite d’être statistiquement significatif) du tacalcitol par rapport au valérate de bétaméthasone (SMD 0,41 IC 95% 0,09 à 0,74 ; n=148). Une autre analyse de 4 études ne montre pas de différence statistiquement significative entre le calcipotriol et le valérate de bétaméthasone (SMD -0,12, IC 95% 0,26 à 0,02 ; n=1557).4 

L’association d’un analogue de la vitamine D et d’un corticostéroïde est fréquente, surtout pour traiter le psoriasis au niveau des membres et du tronc. L’efficacité de l’association semble supérieure à celle d’un corticostéroïde en monothérapie. L’association d’un corticostéroïde à un analogue de la vitamine D atténue les effets indésirables de ce dernier.2 La seule association fixe disponible en spécialité est composée de calcitriol et de dipropionate de bétaméthasone, un corticostéroïde très puissant rarement recommandé en association (voir plus loin).

  • Le Tableau 1. (voir plus loin) reprend les données d’efficacité des analogues de la vitamine D et des corticostéroïdes.
  • L’association calcipotriol + dipropionate de bétaméthasone est plus efficace qu’un placebo (SMD -1,44, IC 95% -1,76 à -1,12, 6 études ; n = 2264).4
  • Une analyse de trois études a montré que l’association calcipotriol + dipropionate de bétaméthasone est plus efficace que le corticostéroïde seul : SMD -0,40 (IC 95% -0,52 à -0,27 ; n = 1026). Une étude comparant l’association calcipotriol + propionate de clobétasol avec le propionate de clobétasol seul arrive à la même conclusion : SMD -0,69 (IC 95% -1,22 à -0,15 ; n=65). Par contre, une autre étude comparant l’association calcipotriol + dipropionate de bétaméthasone versus propionate de clobétasol montre une efficacité moindre (à la limite d’être statistiquement significatif) de l’association (SMD 0,45, IC 95% 0,09 à 0,81 ; n = 122).4 
  • Dans la revue systématique de Mason et al. 4 il n’y a pas d’études comparant une association de corticostéroïde + analogue de la vitamine D avec un analogue de la vitamine D seul.

Tableau 1. Efficacité relative des corticostéroïdes et des analogues de la vitamine D, exprimée en SMD*    

Traitements comparés

SMD (IC95%)

Corticostéroïdes puissants vs placebo

-0,89  (-1,06 à -0,72)

Corticostéroïdes très puissants vs placebo

-1,56  (-1,87 à -1,26)

Tacalcitol vs placebo

-0,73  (-1,09 à -0,37)

Calcitriol vs placebo

-0,92  (-1,54 à -0,29) 

Calcipotriol vs placebo

-0,96  (-1,15 à -0,77)

Calcipotriol vs dipropionate de bétaméthasone

0,43  (0,28 à 0,58)

Tacalcitol vs valérate de bétaméthasone

0,41  (0,09 à 0,74)

Calcipotriol vs valérate de bétaméthasone

-0,12  (-0,26 à 0,02)

Calcipotriol + dipropionate de bétaméthasone vs placebo

-1,44  (-1,76 à -1,12)

Calcipotriol + dipropionate de bétaméthasone vs dipropionate de bétaméthasone seul

-0,40  (-0,52 à -0,27)

Calcipotriol + propionate de clobétasol vs propionate de clobétasol seul

-0,69  (-1,22 à -0,15)

Calcipotriol + dipropionate de bétaméthasone vs propionate de clobétasol, n = 122)

0,45  (0,09 à 0,81)

Association corticostéroïde + analogue de la vitamine D vs analogue de la vitamine D seul

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SMD : Standardised Mean Difference, critère d’évaluation primaire combiné, rassemblant les scores de plusieurs échelles (IAGI ou IGA, TSS, PASI, PAGI ou PGA).

Acide salicylique

L’acide salicylique en usage topique à faible dose peut être associé à un corticostéroïde pour augmenter la pénétration cutanée (et donc l’efficacité) de ce dernier. Il est également utilisé à dose plus élevée pour traiter une hyperkératose, entre autres au niveau du cuir chevelu. En cas d’usage prolongé ou à forte concentration, il peut provoquer une irritation de la peau. Il est conseillé d’évaluer l’efficacité du traitement après 2 semaines d’utilisation.2

Préparations à base de goudron

Les préparations magistrales à base de goudron (crème hydrophile à 5%, 10% ou 20% de coaltar saponiné) étaient proposées dans le traitement du psoriasis du cuir chevelu, en cas d’hyperkératose. Leur mécanisme d’action n’est pas clair ; elles auraient des propriétés anti-inflammatoires, apaiseraient les démangeaisons et réduiraient l’épaisseur de la couche squameuse.2 Les preuves d’efficacité pour ces préparations sont limitées ; elles ne s’avèrent pas plus efficaces qu’un placebo dans le traitement du psoriasis du cuir chevelu (taux de réponse de 19% et 18% respectivement ; critère d’évaluation : échelle IAGI).2,6,8 Le goudron a une odeur désagréable, provoque une coloration brunâtre des textiles et est photosensibilisant. Les suspicions d’un effet carcinogène, mises en évidence dans des études animales, n’ont pas été confirmées chez l'homme.2 Les préparations à base de goudron ne constituent certainement pas un premier choix en cas d’hyperkératose du cuir chevelu; leur utilisation est déconseillée.

Dithranol

En raison de ses effets indésirables (coloration brunâtre de la peau, des cheveux, des ongles et des textiles, irritation cutanée) et de l’instabilité de la préparation magistrale (oxydation rapide), le dithranol n’est plus recommandé.2

Étapes du traitement local du psoriasis en plaques 2,3,7

Le traitement local du psoriasis en plaques se fait souvent par étapes. Le traitement initial est choisi en fonction de la localisation des plaques, de l’âge du patient et de la sévérité de l’affection. Ces recommandations se basent principalement sur celles du Nederlands Huisartsen Genootschap Standaarden (NHG Standaarden) et du National Institute for Health and Care Excellence (NICE).

Adultes

  • Plaques localisées au niveau du visage, des plis cutanés ou des parties génitales :

    • Étape 1: corticostéroïde moyennement puissant (voir chapitre 15.2.3. du Répertoire), 1 fois par jour pendant 4 semaines2.

    • Étape 2: corticostéroïde moyennement puissant le soir + analogue de la vitamine D le matin (ou combinaison fixe 1 fois par jour le soir), pendant 4 semaines.

  • Plaques localisées au niveau du cuir chevelu :

    • Étape 1: corticostéroïde puissant (voir chapitre 15.2.2. du Répertoire), par exemple sous forme de lotion ou de solution, 1 fois par jour pendant 4 semaines. En cas d’hyperkératose : corticostéroïde puissant + acide salicylique, 1 fois par jour jusqu’à disparition des zones hyperkératosiques.

    • Étape 2: corticostéroïde puissant le soir + analogue de la vitamine D le matin (ou combinaison fixe 1 fois par jour le soir), pendant 4 semaines.

    • Étape 3: corticostéroïde très puissant (voir chapitre 15.2.1. du Répertoire) 1 fois par jour pendant 4 semaines. Eventuellement, en cas de lésions persistantes : corticostéroïde puissant sous occlusion, pendant maximum 2 semaines.

  • Plaques localisées au niveau des membres et du tronc :

    • Étape 1: corticostéroïde puissant (voir chapitre 15.2.2. du Répertoire), 1 fois par jour pendant 4 semaines.

    • Étape 2: corticostéroïde puissant le soir + analogue de la vitamine D le matin (ou combinaison fixe 1 fois par jour le soir), pendant 4 semaines.

    • Étape 3: corticostéroïde très puissant (voir chapitre 15.2.1. du Répertoire) 1 fois par jour pendant 4 semaines. Eventuellement, en cas de lésions persistantes : corticostéroïde puissant sous occlusion, pendant maximum 2 semaines.

Enfants

  • Indépendamment de la localisation des plaques :

    • Étape 1: corticostéroïde moyennement puissant, 1 fois par jour pendant 4 semaines.

    • Étape 2: corticostéroïde moyennement puissant le soir + analogue de la vitamine D le matin (ou combinaison fixe 1 fois par jour le soir), pendant 4 semaines.

Note: L’acide salicylique, associé au traitement local dans le cadre d’une hyperkératose, peut également être utilisé à d’autres endroits que le cuir chevelu.

Il est conseillé d’évaluer l’efficacité du (nouveau) traitement après 4 semaines, et après 2 semaines en cas d’application d’un corticostéroïde sous occlusion (risque d’effets indésirables systémiques) ou d’acide salicylique (irritant à long terme).

Lorsque les lésions répondent bien au traitement, il est conseillé d’adopter un schéma de traitement intermittent, où le traitement local est appliqué à la fréquence minimale permettant la stabilisation des lésions. Lorsque le traitement local ne suffit pas ou en cas de psoriasis modéré à sévère, on peut se tourner vers la photothérapie ou un traitement systémique. Dans ce cas, le patient doit être référé à un spécialiste.2, 13

Photothérapie

La photothérapie est indiquée pour le traitement en deuxième ligne des formes modérées à sévères de psoriasis. Le traitement par des rayons ultraviolets de type B (UVB) constitue le premier choix. En cas de réponse insuffisante ou de rechute rapide, on se tournera vers la PUVA-thérapie, qui combine la prise de psoralènes (méthoxsalène) avec une irradiation ultérieure par des rayons ultraviolets de type A (UVA). Le méthoxsalène n’est plus disponible en Belgique (voir chapitre 15.7.5.). Il peut être importé depuis la France ou l’Allemagne.
Ces traitements doivent être prescrits et suivis par un dermatologue. La PUVA-thérapie est associée à un risque accru de cancers cutanés, et ceci vaut probablement aussi pour l’irradiation par les UVB. D’autres effets indésirables possibles sont un érythème pouvant être grave, une sensation de brûlure ou des phlyctènes.2

Traitement systémique

Un traitement systémique peut être envisagé en deuxième ligne, en cas de psoriasis modéré à sévère, lorsque les traitements locaux et/ou la photothérapie ne sont pas assez efficaces, contre-indiqués ou en cas de rechutes rapides.2,3,9 Le traitement systémique comprend des molécules non biologiques administrées le plus souvent par voie orale (immunosuppresseurs, acitrétine) ou des agents biologiques administrés par injection.

Molécules non biologiques

  • Le méthotrexate à faible dose est le traitement systémique de premier choix dans le traitement des formes modérées à sévères de psoriasis en plaques qui répondent mal aux traitements locaux et/ou à la photothérapie. Son efficacité augmente avec la durée du traitement, ce qui le rend intéressant dans le traitement de fond du psoriasis à plus long terme. Le méthotrexate a une marge thérapeutique-toxique étroite et est responsable d’effets indésirables parfois graves tels hépatotoxicité, néphrotoxicité, aplasie médullaire, ulcère gastroduodénal, et très rarement réactions anaphylactiques (voir chapitre 13.2.1. du Répertoire). La prise d’acide folique (4 à 10 mg une seule fois par semaine, au moins 24 heures après la prise de méthotrexate, ou 1 mg par jour), l’utilisation de la dose efficace la plus faible possible (une seule dose hebdomadaire, voir Folia de novembre 2017) et un monitoring strict permettent de diminuer ces effets indésirables.2,3 

  • La ciclosporine peut être une alternative au méthotrexate lorsque celui-ci est contre-indiqué ou mal supporté. 2,3 Elle est également utilisée lorsqu’un effet thérapeutique rapide est souhaité.3 La ciclosporine est un immunosuppresseur avec une marge thérapeutique-toxique étroite et est responsable d’effets indésirables pouvant être graves, notamment une diminution de la résistance contre tout type d’infection, l’apparition de lymphomes et autres cancers, surtout cutanés, une néphrotoxicité, une hypertension ou un hirsutisme (voir chapitre 12.3.1.4. du Répertoire).

  • L'acitrétine (un dérivé synthétique de la vitamine A, voir chapitre 15.7.4 du Répertoire), est surtout utilisée dans les formes particulières de psoriasis, comme le psoriasis pustuleux et le psoriasis érythrodermique. Dans le psoriasis en plaques, il est surtout réservé aux formes sévères en cas d’échec ou de contre-indication au méthotrexate et à la ciclosporine. 2,10 Ces effets indésirables sont nombreux et consistent principalement en une desquamation de la peau et des muqueuses, chute de cheveux, chéilite, ongle incarné, granulomes pyogéniques, phototoxicité, conjonctivite, atteinte hépatique et hypertriglycéridémie. De plus, l’acitrétine est fortement tératogène (voir plus loin).

  • L'aprémilast (un immunomodulateur, voir chapitre 12.3.2.6.2. du Répertoire) est également indiqué dans le traitement du psoriasis en plaques modéré à sévère. L’expérience est encore limitée avec cette molécule et on manque de données comparatives sur son efficacité. De ce fait, la place de l’aprémilast dans le traitement systémique du psoriasis n’est pas claire.10  L’aprémilast peut constituer une alternative aux agents biologiques lorsqu’une administration sous-cutanée ou intraveineuse n’est pas envisageable.3 Le traitement est coûteux et remboursé selon le chapitre IV sous des conditions strictes, notamment en cas d’échec, d’intolérance ou de contre-indication à la photothérapie, au méthotrexate et à la ciclosporine (voir Folia de février 2016). Ses effets indésirables sont principalement d’ordre digestif (nausées, diarrhées) et psychique (idées et comportements suicidaires).

  • ​Le fumarate de diméthyle (Skilarence®, voir chapitre 12.3.2.4.2.) peut aussi être utilisé dans le psoriasis modéré à sévère de l’adulte mais sa place n’est pas claire vu l’expérience encore très limitée et le manque de données d’études sur son efficacité à long terme et comparée aux autres traitements (voir Informations Récentes novembre 2018).11 Ses effets indésirables consistent en une sensibilité accrue aux infections, bouffées vasomotrices, troubles gastro-intestinaux, réactions cutanées, lymphopénie, troubles rénaux et une augmentation des enzymes hépatiques.

  • Les corticostéroïdes par voie systémique n’ont pas de place dans le traitement du psoriasis.

Agents biologiques

Les agents biologiques sont indiqués dans le traitement des formes modérées à sévères de psoriasis et lorsque les molécules administrées par voie orale ne sont pas suffisamment efficaces, sont mal supportées ou contre-indiquées. Les agents biologiques ayant pour indication le traitement du psoriasis en plaques modéré à sévère sont :

  • L'étanercept, l'adalimumab, le certolizumab et l'infliximab: des inhibiteurs du TNF.

  • L'ustékinumab, le sécukinumab, l’ixékizumab, le brodalumab, le guselkumab et le risankizumab: des anticorps monoclonaux ayant pour cible différentes interleukines.

L’efficacité de ces agents biologiques a été prouvée.Les nouvelles recommandations françaises10 et britanniques12 (2019 et 2017 respectivement) émettent des premiers choix de traitement parmi les agents biologiques, contrairement aux recommandations de l’American Academy of Dermatology (2019).13 

Les recommandations françaises positionnent l’adalimumab et l’ustékinumab comme agents biologiques de premiers choix.10 Les recommandations britanniques recommandent l’ustékinumab comme premier choix et l’adalimumab lorsque le psoriasis est associé à de l’arthrite psoriasique.12 Les auteurs des recommandations américaines13 n’émettent pas de premier choix et estiment qu’il faudrait identifier des biomarqueurs qui permettraient de prédire quelle est la molécule la plus appropriée pour un patient en particulier. Des données indiquent une efficacité supérieure du risankizumab à celle de l’adalimumab et l’ustékinumab, mais son recul d’utilisation n’est pas encore suffisant et on manque de données sur son innocuité à long terme [voir Folia de septembre 2019].

Le CBIP ne reprend pas ces premiers choix de traitement car est d’avis que, malgré quelques études prometteuses, de plus amples études comparant leurs efficacités et un plus long recul d’utilisation sont nécessaires pour faire ces choix. Il convient de faire attention aux effets indésirables de ces molécules, à savoir des réactions allergiques pouvant être graves, de l’urticaire, des réactions au site d’injection et une sensibilité accrue aux infections. Un risque d’apparition d’affections malignes ne peut être exclu [voir Répertoire chapitres 12.3.2.1. et 12.3.2.2.]. De plus, il faut tenir compte du coût élevé de ces traitements.

Traitement du psoriasis en plaques pendant la grossesse et la période d’allaitement9-14

Le traitement du psoriasis pendant la grossesse et la période d’allaitement nécessite l’avis d’un spécialiste.

  • Les émollients occupent, certainement pendant la grossesse, une place importante en tant que traitement de fond.
  • Les corticostéroïdes locaux peuvent être utilisés pendant la grossesse. Il n’y a pas d’indice de tératogénicité lors de l’application locale de corticostéroïdes chez la femme enceinte. On utilisera de préférence des préparations peu ou moyennement puissantes (voir chapitres 15.2.4. et 15.2.3. du Répertoire) et une durée de traitement la plus courte possible. L’application de corticostéroïdes plus puissants, surtout pendant une période prolongée, sur des surfaces étendues, sur une peau irritée ou sous occlusion, est associée à un risque d’absorption systémique et donc à un risque d’apparition d’une insuffisance surrénalienne chez le fœtus et le nouveau-né, et à un risque possible de retard de croissance intra-utérine. Pendant la période d’allaitement, les mêmes mesures sont d’application pour éviter le risque d’effets indésirables systémiques chez l’enfant allaité.
  • Les analogues de la vitamine D paraissent sûrs pendant la grossesse et la période d’allaitement, vu leur absorption systémique très limitée. Les études chez l’animal sont rassurantes mais on manque de données chez le fœtus humain et sur l’excrétion dans le lait maternel.
  • Les préparations à base de goudron ne sont pas à recommander pendant la grossesse et la période d’allaitement, au vu des effets indésirables et du manque de recul sur l’innocuité de ces préparations.
  • La PUVA-thérapie est contre-indiquée pendant la grossesse en raison des propriétés mutagènes et carcinogènes de ce traitement. L’allaitement doit être interrompu pendant les 24 heures suivant la prise de méthoxsalène. Aucune information n’a été trouvée concernant le traitement par des rayons UVB.
  • Le méthotrexate est contre-indiqué pendant la grossesse, même à faibles doses, car est tératogène. Une méthode de contraception efficace est recommandée pendant toute la durée du traitement, ainsi que pendant au moins 3 mois après la fin du traitement, tant chez l’homme que chez la femme (voir chapitre 13.2.1. du Répertoire). Pendant l’allaitement, le méthotrexate est également contre-indiqué, même à faibles doses, en raison du risque d’effets indésirables chez l’enfant allaité.
  • La ciclosporine n’est pas tératogène chez l’animal. Les données concernant son innocuité chez la femme enceinte et allaitante sont limitées mais il n’y a pas d’indice d’un effet tératogène ou embryotoxique.
  • L'acitrétine est hautement tératogène et embryotoxique (voir chapitre 15.7.4. du Répertoire). L'acitrétine ne peut ni être utilisée, ni être manipulée, p. ex. dans le cadre d'une préparation magistrale, par une femme enceinte ou qui envisage une grossesse. Chez les femmes en âge de procréer, une contraception efficace (de préférence par deux méthodes complémentaires incluant une méthode mécanique) est requise pendant toute la durée du traitement ainsi que pendant les trois ans suivant l'arrêt du traitement. L'acitrétine est également contre-indiquée pendant la période d'allaitement en raison de ses effets indésirables.
  • On manque de recul sur l’utilisation de l’aprémilast, du fumarate de diméthyle et des agents biologiques pendant la grossesse et l’allaitement. Ces molécules ne sont donc pas à recommander. Toutefois, pour l’adalimumab, il existe une expérience, bien qu’encore limitée, avec des résultats rassurants.


Sources 

1 Parisi R, Symmons DP, Griffiths CE, Ashcroft DM. Global epidemiology of psoriasis: a systematic review of incidence and prevalence. J Invest Dermatol. 2013;133(2):377-385. (doi: 10.1038/jid.2012.339).
2 NHG Standaarden. Psoriasis. 2014. Disponible en ligne: https://www.nhg.org/standaarden/samenvatting/psoriasis 
3 National Institute for Health and Care Excellence (NICE). Psoriasis : assessment and management. Clinical Guideline. 2012. Online via: www.nice.org.uk/guidance/cg153
4 Mason AR, Mason J, Cork M, Dooley G, Hancock H. Topical treatments for chronic plaque psoriasis. Cochrane Database Syst Rev. 2013;(3). (doi: 10.1002/14651858.CD005028.pub3).
5 British National Formulary. Psoriasis. Consulté en ligne pour la dernière fois le 02 janvier 2018
6 M. Tijssen. Lokale behandeling psoriasis vulgaris. Geneesmiddelenbulletin. 2011 ; 73-80
7 Psoriasis. Formulaire de Soins aux personnes âgées. Farmaka
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15 Briggs GG, Freeman RK. A Reference Guide To Fetal and Neonatal Risk: Drugs in Pregnancy and Lactation, 10ième édition: version électronique.
16 Lareb:
https://www.lareb.nl/teratologie-nl/zwangerschap/#TOC_Middelen_bij_psoriasis et
https://www.lareb.nl/teratologie-nl/borstvoeding/#TOC_Middelen_bij_psoriasis1
17 LactMed : https://toxnet.nlm.nih.gov/newtoxnet/lactmed.htm.